La dissolution de la nécessité des frontières d’un « moi »

Le sentiment de soi évolue avec la méditation. Peu de recherches scientifiques existent sur cette dimension subjective dans le cadre de la méditation qui dépasse largement les approches sur la personnalité ou l’estime de soi. Heureusement, des études avancées commencent à apparaître.

C’est le cas de « Qu’est-ce que cela fait de ne plus avoir un sentiment de frontières ? Une étude de cas d’un méditant de long terme » (How does it feel to lack a sense of boundaries? A case study of a long-term mindfulness meditator (pdf) publiée en décembre 2015 dans Consciousness & Cognition.  C’est une étude neuro-phénoménologique très intéressante effectuée par des chercheurs israéliens (Ataria Yochai, Dor-Ziderman Yair, Berkovich-Ohana Aviva)  qui prend en compte à la fois la vision à la 1ère personne décrite par le méditant (phénoménologique) et la vision à la 3ème personne de l’IRM (neurologique). L’étude décrit la façon dont ces frontières de soi peuvent se dissoudre progressivement.

Lorsque la méditation s’approfondit, le sentiment d’un besoin de protection diminue jusqu’à ce « qu’il n’y ait plus besoin de frontières » comme le ressent ce méditant vipassana avancé:

  • La distinction interne/externe disparaît, de même que
  • le temps et l’espace
  • le sentiment de soi
  • l’impression d’être aux commandes, de contrôler (sense of agency)
  • de posséder quoi que ce soit (sense of ownership)
  • et d’être localisé dans le corps (egocentric bodily perspective).

Dans l’expérience du méditant telle qu’elle est décrite dans l’article, il reste, au sein de l’absence de frontières, des sensations corporelles et une structure « ce qui touche/ ce qui est touché ».

Le tableau ci-dessous résume les trois étapes décrites dans l’entretien avec le méditant vipassana avancé et les critères de dissolution de ces frontières du sentiment d’un « moi »:

Abstract

This paper discusses the phenomenological nature of the sense of boundaries (SB), based on the case of S, who has practiced mindfulness in the Satipathana and Theravada Vipassana traditions for about 40years and accumulated around 20,000h of meditative practice. S’s unique abilities enable him to describe his inner lived experience with great precision and clarity. S was asked to shift between three different stages: (a) the default state, (b) the dissolving of the SB, and (c) the disappearance of the SB. Based on his descriptions, we identified seven categories (with some overlap) that alter during the shifts between these stages, including the senses of: (1) internal versus external, (2) time, (3) location, (4) self, (5) agency (control), (6) ownership, and (7) center (first-person-egocentric-bodily perspective). Two other categories, the touching/touched structure and one’s bodily feelings, do not fade away completely even when the sense-of-boundaries disappears.

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