Pourquoi « décrasser » notre attention ?

« Se décrasser les muscles » par le sport est une expression courante mais qu’est-ce que « décrasser notre attention » ? Et pourquoi se décrasser régulièrement par la pratique de la pleine conscience ?

Qu’est-ce que « décrasser » ?

Selon Le Larousse, décrasser a plusieurs sens, notamment :

  1. Agiter un métal en fusion afin de séparer de sa masse les crasses qui s’y trouvent.
  2. Ôter la couche de crasse qui salit quelqu’un, quelque chose, le nettoyer : Décrasser un peigne.
  3. Tirer quelqu’un, son esprit de l’ignorance ; l’instruire, le dégrossir.
  4. Familier. Rendre à ses muscles leur souplesse : La culture physique vous décrassera un peu.

Le décrassage de l’attention

Tous ces sens peuvent s’appliquer à l’attention, considérée comme un projecteur, éclairant tel ou tel événement sensoriel ou mental (stimulus) :

(1) Comme l’or en fusion, le décrassage semble bien s’appliquer à la « purification » de nos processus cognitifs. Notre perception est moins mélangée avec une définition de soi-même ou des choses, pour laisser apparaître une « attention nue », non conceptuelle. Nous retrouvons un regard frais et neuf sur la réalité. Et généralement, lorsqu’on ne nourrit plus les représentations mentales par de l’attention et de l’énergie, elles « meurent ». Elles laissent la place à plus de vérité, de stabilité, d’authenticité « pure ». C’est de l’or pur ! Parfois, un sentiment d’unité se dégage de la Réalité, lorsqu’elle n’est plus découpée et divisée par le travail du mental.

(2) En arrêtant de se situer dans le mental, nous pouvons nous libérer des luttes émotionnelles liées à une vision étriquée de la réalité et à un sentiment de soi limité. En somme, nous décrassons le mental pour pouvoir l’utiliser avec discernement comme un outil utile. La méditation de pleine conscience est comme un nettoyage, une cure detox !

(3) Cela nous sort aussi de l’ignorance. Cela nous dégrossit pour rendre notre attention plus affinée et permettre des prises de conscience, des insights, l’éveil.

(4) Et cela donne plus de flexibilité psychologique. Cela rend à nos muscles perceptifs leur souplesse pour élargir nos cadres de perception nécessairement limités.

Ce décrassage n’est pas qu’un mot ; cela peut être un ressenti. Un participant à une méditation de 45 minutes ce matin disait qu’il se sentait « nettoyé », « tout propre » ! La pleine conscience opère un nettoyage mental et émotionnel.

Comment décrasser notre attention ?

En arrêtant de s’impliquer dans le fait de penser pour être simple conscience silencieuse. Par une attention nue, sans volonté d’obtenir quelque chose, qui ne s’accroche pas aux pensées ni veut les arrêter. Les pensées sont vues comme des événements mentaux, plutôt que comme la réalité ou soi-même.

Nous ne nous identifions pas à elles, nous ne situons pas en elles et les traitons avec bienveillance comme toutes choses.

Au mieux, les pensées sont des hypothèses avec plus ou moins de probabilité de refléter l’entièreté et la complexité de la réalité. Plusieurs exercices de méditation et d’exercices cognitifs peuvent être pratiqués au quotidien pour cela.

C’est le désintérêt qui libère des pensées et non une volonté de les arrêter. L’attention se résorbe alors dans sa source vide, limpide et claire. Si vous essayez d’arrêter la pensée avec la pensée, il n’y a pas de fin à ce processus. Comme le disait le célèbre enseignant zen Bankei (1622-1693), ce serait comme « vouloir laver du sang avec du sang« .

Ce décrassage s’accompagne d’ouverture, de liberté, de grande clarté et d’accueil sans limite. De la même façon que le décrassage de l’or ne fait que révéler le métal dans sa pureté, le décrassage de la couche mentale de perception ne fait que dévoiler la pureté primordiale de la conscience. En arrêtant de se situer dans la pensée, nous permettons à la pureté de la conscience de se dévoiler et de rayonner.

Bon nettoyage !

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