Les esprits distraits seraient moins heureux

Suite à notre article sur William James et l’importance de la « faculté de ramener volontairement une attention vagabonde, encore et encore », voici un extrait d’un article de presse sur une recherche récente montrant une corrélation entre concentration et sentiment de bien-être.

« Selon une étude menée par deux psychologues d’Harvard, les êtres humains ne sont pas à ce qu’ils font près de la moitié du temps, ce qui aurait un impact négatif sur leur bien-être. Seul l’acte sexuel retiendrait presque toujours notre entière attention.

Les philosophies de la sagesse appellent souvent les hommes à vivre dans le moment présent pour être heureux. Des chercheurs de l’université d’Harvard ont cherché à apporter un fondement scientifique à cette croyance très répandue. En utilisant un nouveau mode d’investigation à grande échelle, ils ont pu interroger fréquemment plus de 5000 volontaires en temps réel sur leur niveau de bien-être ressenti et l’état de distraction associé. L’ensemble de ces témoignages leur a permis de montrer que les personnes qui n’étaient pas concentrées sur leur tâche se sentaient effectivement moins épanouies que les autres.

Pour arriver à ces conclusions publiées en ligne dans la prestigieuse revue Science, les psychologues ont mis en place une application appelée «Track your happiness». Sur le site du même nom, les volontaires s’inscrivent et communiquent leur âge, profession, nationalité, taille, poids, etc. Après avoir rempli plusieurs questionnaires, ils donnent leur numéro de téléphone et choisissent le nombre de fois qu’ils seront interrogés chaque jour sur l’activité qu’ils pratiquent et l’état de distraction associé au moment où il reçoive le message. L’application a été conçue pour fonctionner avec les iPhones.

Au final, les chercheurs ont sélectionné les témoignages de 2250 adultes âgé de 18 à 88 ans et issus de 83 pays différents (73,9% d’entre eux résident aux Etats-Unis et tous sont équipés d’un iPhone). De l’analyse de ces données, il ressort que ces possesseurs d’iPhone n’ont pas la tête à ce qu’ils font près de la moitié des fois où ils sont interrogés. Quand ce sont des pensées agréables qui leur traversent l’esprit, leur sensation de bien-être n’est pas affectée. Mais quand ces doux rêveurs ont des idées noires ou neutres, alors la sanction tombe: ils se sentent moins heureux. En somme, «un esprit humain est un esprit distrait, et un esprit distrait est un esprit malheureux», résument les deux auteurs Matthew Killingsworth et Daniel Gilbert. S’ils saluent la capacité de l’homme à se plonger dans le passé ou à se projeter dans l’avenir, les psychologues sont obligés de constater que «pouvoir penser à quelque chose qui n’a pas réellement lieu est une habilité cognitive qui a un coût émotionnel». Des études statistiques fines permettent en effet de montrer que la distraction est source du malheur, et non l’inverse.

Autre découverte intéressante, notre distraction n’est généralement pas liée à notre activité. Ce que nous faisons a bien un impact sur notre sensation de bien-être, mais indépendamment de notre concentration. Lorsque les volontaires sont en train de discuter ou de faire de l’exercice, ils se sentent globalement bien. Mais ils sont moins heureux lorsqu’ils travaillent ou qu’on les tire de leur sommeil.

Dernière observation saisissante, la concordance, très nette cette fois-ci, entre le bonheur très intense ressenti pendant l’acte sexuel (la note donnée par les volontaires culmine à de plus de 90 sur une échelle de 100), et la capacité à rester concentré pendant cette activité. Faire l’amour est la seule activité pendant laquelle moins de 30% des témoignages font état d’un sentiment de distraction. »

Source : Article par Tristan Vey. http://www.lefigaro.fr/sciences/2010/11/12/01008-20101112ARTFIG00653-les-gens-distraits-seraient-moins-heureux.php

Voir aussi :

  • The Science Behind the Smile, entretien avec le professeur de psychologie à Harvard, Daniel Gilbert. He is widely known for his 2006 best seller, Stumbling on Happiness. His work reveals, among other things, the systematic mistakes we all make in imagining how happy (or miserable) we’ll be.
  • A Wandering Mind Is an Unhappy Mind, Matthew A. Killingsworth,Daniel T. Gilbert, Science, 12 Nov 2010:Vol. 330, Issue 6006, pp. 932
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